Par Jean Christophe Bataille.
Je fais suite à mon article "La charge de la dette et l'impératif d'un euro faible"
Le FMI estime que le problème de la dette publique des pays avancés du G20 va en s'aggravant puisqu'elle passerait de 104,4 (en moyenne) du PIB en 2010 à 115,5% en 2014 (même si c'est inférieur aux 118,4% prévus en novembre dernier, chacun a bien conscience que les politiques d'austérité vont considérablement modifier la donne en alourdissant le poids relatif du service de la dette au cours des 3 prochaines années).
Les déclaration de Greg Ribbs traduites par contre info méritent de figurer dans un article de Futures :
Passer rapidement d’un déficit budgétaire à deux chiffres à un excédent - comme on l’exige aujourd’hui de la Grèce, soit dit en passant - provoquerait à tout coup une récession de grande ampleur, ou pire encore. Comme la plupart de ses confrères, l’analyste Greg Ribbs de la Royal Bank of Scotland, constate avec pragmatisme ce que les politiques semblent encore refuser d’admettre. La politique budgétaire ayant atteint ses limites, le monétaire, c’est-à-dire les banques centrales, devra prendre le relais. Le niveau de la dette publique - mais aussi privée - dans le monde développé est tel que son remboursement à sa valeur actuelle est inenvisageable, à moins de vouloir tuer le malade à coup de saignées en prétendant le guérir. Le précédent de l’apurement des dettes de la seconde guerre mondiale - bien supérieures - montre sans équivoque quelle est la seule issue possible hors défaut de paiement. Elle requiert un taux de croissance nominal du PIB supérieur au taux d’intérêt. Ce qui en clair signifie une augmentation sensible de l’activité accompagné par une inflation soutenue. Willem Buiter, l’a rappelé récemment : aux USA la dette a été ramenée de 121% du PIB en 1946 à 31% en 1974. Dans ce désendettement nominal la contribution du facteur inflation a été aussi importante que celle de la croissance. Plus encore, la contribution budgétaire a été négative. Durant ces 28 ans, 20 exercices ont été déficitaires. Bien que cette conception ait été évacuée de la pensée économique dominante, il est urgent de se rappeler que la monnaie est une fonction, et non une ressource en quantité limitée, imposant de l’extérieur ses contraintes au destin des sociétés. Suspectant la complaisance des politiques, la très vertueuse Europe s’est privée du bras armé de la politique monétaire, en déléguant la responsabilité de la création de la monnaie au seul privé - crédité contre toute vraisemblance d’un meilleur jugement et d’une plus grande prudence en la matière. Funeste erreur. En multipliant sans retenue les créances, qui sont une autre forme de la monnaie, les banques ont gravement compromis la valeur de celle-ci, bien avant que la crise n’atteigne sa phase aigüe. Nous sommes ces jours-ci tympanisés de discours se présentant comme empreints d’un épais bon sens sur la nécessaire rigueur, bien que le mot soit banni, afin de mieux faire passer la chose. Mais, comme dans les années 1930, cette rationalité n’est qu’apparente : en exigeant d’insupportables ponctions sur l’activité pour rembourser une dette odieuse, l’appauvrissement généralisé est garanti, aussi bien pour les débiteurs que pour les créanciers. Le sacrifice de la souveraineté monétaire que l’Europe s’est imposée n’est plus de mise. La seule solution raisonnable passe par un dégonflement de la dette en utilisant les outils - tous les outils - à notre disposition : une cible d’inflation modérée et soutenue, accompagnée et facilitée par la monétisation. Et lorsque ce sont des banquiers, cette fois dégrisés, qui nous l’affirment, il convient de tendre l’oreille
Je suis en accord avec chaque mot de ce texte. Mon opinion est que les plans de rigueurs occidentaux, s'ils sont nécessaires, ne suffiront pas. La monétisation de la dette de pays comme la France ou l'Allemagne mise oeuvre en ce moment par la BCE montre que les banquiers centraux ont compris que la sortie de crise n'était possible que par une stagflation maitrisée. Les théories monétaristes et déflationnistes sont vouées à l'échec et dans l'état actuel des choses, elles aboutiraient à une destruction totale de l'économie occidentale et une domination sans partage des économies émergentes. Les dettes souveraines occidentales à taux fixe sont condamnées à se déprécier et il convient donc de les exclure de nos portefeuilles.