Par Jean Christophe Bataille

Comme d'habitude, je ne prévoirai pas la fin du monde. Ce n'est pas le propos de Futures ... La situation des pays occidentaux va toutefois rester difficile car la
socialisation des dettes privées réalisée en 2009 n'a bien sûr pas fait disparaitre l'endettement. Elle a, en revanche, créé toutes les conditions d'une stagflation.
Il n'y aura donc pas de déflation à la japonaise, ni de déflation du type de celle de 1929. La situation évolue comme je l'avais prévu il y a deux ans, pour toutes
les raisons que j'ai déja avancées par le passé.
Nous avons plusieurs certitudes :
- Le découplage des émergents est désormais indubitable et il tirera durablement la croissance mondiale, éliminant tout risque de dépression profonde même
si une rechute modérée des économies est probable à la fin des plans de relance, même si une nouvelle crise bancaire est possible.
Les chiffres donnent presque le tournis. “Chaque année, près de 80 millions de personnes intègrent les classes moyennes dans les
pays émergents [...]. Exposés à de nouvelles idées, de nouveaux produits, de nouveaux marchés, les ménages des classes moyennes aspirent à consommer des produits et des services inédits [...]. En
2030, 16,1% de la population mondiale appartiendra à “la classe moyenne globale” (contre 7,6% en 2000).
Plus de 1 milliard de personnes dans les pays en développement auront accès à des produits et à des services de classe mondiale”, expose Nordea. Et Raiffeisen Capital Management d’ajouter :
“Les importations des pays BRIC dépassent désormais le volume d’importations des Etats-Unis.” Un autre chiffre : en décembre dernier, les ventes au détail au Brésil ont progressé de 9,1% en
rythme annuel. Les grands réservoirs de consommateurs se trouvent donc en Chine, en Inde, au Brésil et, dans une moindre mesure, dans certains pays d’Amérique latine et du
Moyen-Orient.
Source Moneyweek
- La dette souveraine occidentale déjà très importante va avoir une propension à augmenter.
- Les états de l'OCDE subiront la pression des marchés pour équilibrer leur budget et tenter de réduire leurs dettes.
- Les états obtempèreront sans pouvoir réduire suffisamment cet endettement car la paix sociale sera une préoccupation politique au moins aussi importante
que l'attente des investisseurs.
- Les Etats-Unis seront logés a la même enseigne que l'Europe ou le Japon. La faillite de la Californie vaut largement celle de la Grèce ou celle de
l'Espagne. Seules les agences de notation americaines peuvent encore affirmer le contraire ...
- Il ne faudra pas compter sur le FMI pour régler la crise car cette institution est essentiellement alimentée par des états endettés et ses capacités
d'intervention sont insuffisantes en cas de défaillance de plusieurs pays comme l'Espagne.
- Si les taux longs se mettaient à monter, la tentation serait grande pour les banques centrales de monétiser a nouveau la dette des états pour contenir
cette ascension.
- Si les banques connaissaient de nouvelles difficultés, les banques centrales injecteraient à nouveau massivement des liquidités.
Ces certitudes nous conduisent a penser que nous assisterons à un mélange de tentative de rigueur budgétaire et d'un important laxisme monétaire qui au
final ne peut aboutir qu'à une croissance très molle, voire une nouvelle récession, et une dévaluation des monnaies en occident. Cette situation a un nom : la stagflation.
Celle-ci ne rentrera dans les faits que lorsque la vigueur de la croissance émergente, les sous-capacités de production en pétrole et autres matières premières
et le laxisme monétaire occidental auront fait monter les prix à la consommation. Cette ascension des prix, probablement effective à l'horizon de deux ans, sera une parfaite justification à
la montée des salaires qui, il faut le rappeler, restent majoritairement indexés sur les prix. Il faut comprendre que l'indice des prix sous-pondérait jusqu'à présent les dépenses courantes
domestiques et sur-pondérait les produits importés. C'est l'inverse qui va se produire désormais car nous allons assister à une hausse des produits fabriqués dans les pays émergents et une hausse
des matières premières :
- Augmentation des salaires et début de couverture sociale chez les émergents (c'est déjà le cas). C'est à dire une montée des coûts de main d'oeuvre.
- Sous capacité de production dans le domaine de l'énergie et de certaines matières premières. C'est à dire une montée des coûts-matières.
- Baisse des monnaies occidentales par rapport à tous les actifs tangibles venus des émergents.
La montée des prix sera également une justification à l'acceptation d'une montée des taux longs et elle sonnera le glas de l'intervention des banques centrales
sur la portion longue de la courbe des taux. Cette montée se fera soit lentement, soit via un véritable krach obligataire. Le délai de survenue de la montée des taux dépendra de la tolérance des
créanciers de l'occident aux grandes manoeuvres des banques centrales.
La stagflation devrait rester gérable. Une hyperinflation à la Weimar diffuse à tout l'occident est une hypothèse inconcevable pour moi. Celle-ci ne peut naître que
dans un pays isolé, en très forte sous-capacité de production, abandonné par une communauté internationale qui poursuivrait un chemin économique et monétaire vertueux. Ce ne sera pas le cas et la
dévalorisation du dollar et de l'euro obligera la communauté des états à agir de concert. Nous nous dirigerons donc plutôt vers une refonte complète du système monétaire dans un contexte
de montée excessive mais supportable des prix et des revenus en monnaie courante.
Cette stagflation devrait se pérenniser de nombreuses années jusqu'a dilution de la dette souveraine et de l'endettement des ménages. Les banques centrales
occidentales pourront alors enfin faire monter brutalement les taux courts comme le fit Volker dans le passé pour juguler l'inflation et repartir sur un nouveau cycle vertueux. Avant cela,
les créanciers obligataires en particulier les retraités du baby boom auront vu leur épargne obligataire fondre comme neige au soleil. L'âge de la retraite aura été reculé de plusieurs années et
le système social sera nécessairement moins généreux
***
Il est temps d'investir dans l'immobilier
Les propriétaires de biens immobiliers auront beaucoup moins perdu durant cette période car si le prix de la pierre doit baisser en monnaie constante, il montera
tout de même en monnaie courante et les loyers suivront assez bien le rythme de l'inflation, augmentant ainsi les rendements vers des ratios plus proches de ceux de la médiane de la courbe de
Friggit.
Pour les propriétaires endettés à taux fixe au niveau actuel et en cours d'amortissement, cette situation sera bien sûr une aubaine. Ils bénéficieront en effet
d'un triple levier :
- Diminution des mensualités de crédits en monnaie constante du fait de la hausse des prix et des revenus en monnaie courante.
- Mise a l'abri du capital contre l'inflation.
- Augmentation des loyers en monnaie courante.
Bien sûr, une nouvelle crise systémique bancaire liée aux engagements des établissements financiers sur les dettes souveraines peut créer une nouvelle poussée de
déflation sur les actifs immobiliers en réduisant l'accès au crédit mais celle-ci sera de courte durée car les banques centrales choisiront bien évidemment d'injecter des montagnes de liquidités
pour empêcher tout crédit crunch.
C'est pourquoi, devant l'arrêt de la baisse des prix immobliers et le très bas niveau des taux d'intérêt en occident, je recommande désormais
fortement l'achat immobilier à fort rendement, financé à crédit et à taux fixe, avant que ces derniers ne commencent à monter.
***
Les actions occidentales centrées sur les marchés domestiques peuvent se reprendre ou au contraire chuter à l'occasion d'une nouvelle crise systémique
bancaire mais elles resteront à la traine en monnaie constante sur le long terme.
Le ratio Dow sur Gold est amené a diminuer irrémédiablement. Les actions seront donc moins profitables que dans le passé. En protection du capital, je
recommande l'achat de certains fonds actions des pays émergents, les fonds matières premières dans les baisses importantes de marché et préférentiellement durant une reprise du cross EUR
USD. Je conseille également d'accumuler les parapétrolieres francaises à la baisse dans le cadre d'un PEA. L'allocation des actions européennes ne devrait pas augmenter et rester axées sur
le rendement telle qu'elle figure actuellement dans le forecast.
***
Il faut fuir les obligations à taux fixe occidentales et diminuer l'allocation en Euros des contrats d'assurance vie.
Tous les investissements de ce forecast (apport personnel achat immobilier, achat d'actions) doivent se faire en vendant les obligations ou les avoirs en euros
inclus en contrats d'assurance vie dont il faut désormais diminuer la proportion.
***
L'or, en particulier physique, doit rester une composante significative du patrimoine. Pour ceux qui n'en ont pas, l'or et les minières aurifères peuvent encore être acquises dans un creux de marché. Attention, seul leur prix en euros nous intéresse.
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Les répartitions patrimoniales pour les mois a venir devraient donc se transformer :
Pour les patrimoines supérieurs à 1.5 millions d'euros :
Or physique
|
7%
|
Mines d'or
|
5%
|
Mines d'or moyenne importance
|
1%
|
Euros
|
7%
|
Obligations taux fixes
|
0%
|
Obligations émergents
|
3%
|
Obligations taux variables
|
5%
|
Action Emergents
|
6%
|
Energie matières premieres
|
5%
|
Actions défensives européennes
|
4%
|
Avoirs spéculatifs
|
2%
|
Immobilier
|
55%
|
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100%
|
Pour les patrimoines sités entre 400 000 euros et 1.5 millions d'euros :
Or physique
|
7%
|
Mines d'or
|
5%
|
Mines d'or moyenne importance
|
1%
|
Euros
|
3%
|
Obligations taux fixes
|
0%
|
Obligations émergents
|
3%
|
Obligations taux variables
|
5%
|
Action Emergents
|
6%
|
Energie matières premieres
|
5%
|
Actions défensives européennes
|
3%
|
Avoirs spéculatifs
|
2%
|
Immobilier
|
60%
|
|
100%
|
Pour les patrimoines inférieurs à 400 000 euros :
Or physique
|
8%
|
Mines d'or
|
6%
|
Mines d'or moyenne importance
|
1%
|
Euros
|
17%
|
Obligations taux fixes
|
0%
|
Obligations émergents
|
3%
|
Obligations taux variables
|
6%
|
Action Emergents
|
10%
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Energie matières premieres
|
8%
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Actions défensives européennes
|
6%
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Avoirs spéculatifs
|
5%
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Immobilier
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30%
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100%
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Précision importante : le ratio immobilier représente, comme dans une déclaration ISF, la partie amortie du bien soit sa valeur vénale inscrite à l'actif otée du capital restant dû inscrit au passif. En cas de nouvelle acquisition, il correspond à l'apport en
fond propre mais est amené à croitre avec l'évolution et l'amortissement du crédit.